Bernd Storck, le chef d’orchestre de Mouscron
L’entraîneur de l’Excel Mouscron est sur le bon chemin pour réussir un fameux challenge : le maintien des Hurlus en D1.
- Publié le 14-12-2018 à 17h51
L’entraîneur de l’Excel Mouscron est sur le bon chemin pour réussir un fameux challenge : le maintien des Hurlus en D1. La mission semblait impossible lorsque Bernd Storck est arrivé à la tête de l’Excel Mouscron : il fallait sauver les Hurlus en D1A. Des Hennuyers qui avaient réalisé leur pire début de saison : un zéro pointé après six journées de championnat. Rencontre avec cet Allemand qui n’a pas peur d’imposer ses idées.
Bernd Storck, quand vous avez repris l’Excel, les Hurlus n’avaient pas encore pris de point. On disait alors qu’il faudrait un miracle pour que le club se maintienne. Aujourd’hui, on peut dire que le miracle est réalisable.
"C’est encore beaucoup trop tôt pour l’affirmer. Certes, nous avons une meilleure position au classement général, mais nous sommes loin encore d’être sauvés. Et puis, doit-on parler de miracle ? Il y a surtout du travail et une philosophie à laquelle mon groupe a adhéré. Je leur ai fait comprendre là où je voulais aller et comment nous allions y arriver. Cette mission de sauvetage, nous la réaliserons ensemble, en restant unis. Nous avons déjà résolu quelques problèmes mais nous n’avons toujours rien d’acquis. La base est là, l’état d’esprit aussi."
Vous parlez souvent de votre philosophie. Mais, justement, c’est quoi la philosophie de Bernd Storck ?
"Il faut avoir un plan dès qu’on a le ballon. Tactiquement, dans le positionnement, tout le monde doit savoir ce qu’il doit faire. Nous devons avoir une ligne de conduite et nous y tenir. C’est pour cela que j’ai fait beaucoup de tests dans l’équipe quand je suis arrivé. Et puis, j’accorde aussi beaucoup d’importance à la confiance. Un joueur de football doit croire en lui, en ses capacités."
On dit aussi que vous connaissez tous vos adversaires sur le bout des doigts.
"Évidemment, j’analyse beaucoup nos adversaires. Chaque coach a ses plans par rapport à l’adversaire. Partout où je suis allé, j’ai toujours étudié à fond mes adversaires. Mais cela ne se limite pas seulement à regarder les matchs sur vidéos. J’aime beaucoup me rendre dans les stades pour tout connaître sur ce club : comment est le terrain, comment réagissent les supporters, où se trouvent nos espaces… C’est important selon moi de bien connaître l’atmosphère, l’environnement dans lequel nous allons évoluer. Mais aussi et surtout, j’analyse notre équipe. J’insiste en semaine sur ce que l’on a moins bien fait durant la semaine."
En tant qu’ancien défenseur, cette ligne arrière qui encaisse peu, c’est votre marque de fabrique ?
"Pas vraiment. La défense, c’est la base d’une équipe. J’ai appris cela grâce à mon passé de footballeur mais surtout parce que j’ai côtoyé beaucoup d’entraîneurs durant ma carrière. Pour moi, l’important c’est d’avoir une bonne organisation. Défensive d’abord. Ensuite, c’est de pouvoir se créer des occasions. Si notre défense tourne, c’est parce que les gars sont réceptifs aux critiques et que l’on a su gommer des erreurs."
Depuis votre arrivée, vous avez pris quelques décisions qui auraient pu vous rendre impopulaire, comme le renvoi de joueurs dans le noyau B ou la mise à l’écart de quelques membres du staff.
"Je suis mon chemin. Si je suis à Mouscron, c’est pour sauver le club. Alors oui, parfois il faut prendre des décisions impopulaires. Mais je ne dois pas m’en soucier. Quand je suis arrivé, j’ai donné sa chance à tout le monde. Mais il faut qu’en retour les gens veuillent travailler selon ma manière. Je prends toutes les responsabilités et, en cas d’échec, je n’aurai pas d’excuses. Ces décisions, je devais les prendre, même si ce n’est pas toujours facile à comprendre pour certaines personnes."
Quand on vous écoute parler, on a l’impression que vous voulez vous inscrire dans la durée à Mouscron.
"J’ai de bonnes conditions de travail ici. Alors oui, j’aimerais continuer à travailler dans ce club qui a tout de même une petite histoire. Mon souhait, c’est de voir ce club grandir encore et que le stade se remplisse. Face à Zulte, il y avait une chouette petite ambiance. Mais cela pourrait être mieux."
Un travail en symbiose avec Jurgen Rober
Au fil des années, Bernd Storck et Jurgen Rober sont devenus inséparables.
Bernd Storck ne s’en cache pas : s’il a débarqué au Canonnier, c’est parce que son ami Jurgen Rober, le discret directeur sportif de l’Excel Mouscron, le lui a demandé.
"Nous nous sommes rencontrés aux cours de Pro Licence", raconte l’entraîneur de l’Excel. "Évidemment, je le connaissais en raison de sa carrière de joueur. C’était un fantastique joueur, un milieu de terrain qui pouvait mettre des buts et qui abattait un travail fantastique. D’ailleurs, plusieurs fois, il a reçu le prix pour le but du mois en Allemagne."
Nous avons pu en être témoin l’année passée, lors du stage hivernal en Espagne : un groupe d’Allemands avait reconnu Jurgen Rober. "Il est connu chez nous, vous savez."
Jurgen Rober a pris Bernd Storck avec lui comme assistant à Stuttgart, au Hertha Berlin, à Wolfsburg et au Partizan Belgrade. "J’ai beaucoup appris avec lui. Ce qui était bien, c’est que l’on a toujours travaillé en symbiose. Il ne m’a jamais donné l’impression de n’être qu’un assistant. Il me demandait mon avis même si à la fin, c’est lui qui prenait ses responsabilités. Quand il a arrêté d’être entraîneur, j’ai voulu poursuivre ma route, seul, et passer T1."
À Mouscron, il n’a pas l’impression d’avoir une belle-mère sur le dos. "C’est lui qui m’a convaincu de rejoindre ce projet. On se parle beaucoup évidemment. Il a toujours sa vision du football et puis il apporte beaucoup à Mouscron comme directeur sportif."
"Travailler en club est plus intéressant"
Bernd Storck a entraîné la Hongrie durant l’Euro 2016.
Si, pour beaucoup, le nom de Bernd Storck ne disait rien quand il avait été intronisé à Mouscron, pour d’autres, l’Allemand rappelait quelques (bons) souvenirs. Il était à la tête de la Hongrie durant l’Euro 2016, équipe que nos Diables avaient éliminée en huitièmes de finale : 0-4.
"Être sélectionneur national ou entraîneur de club, ce sont deux métiers différents" , souligne Bernd Storck. "Il y a du bon et du moins bon dans les deux fonctions."
À la tête de l’équipe nationale hongroise, il a réalisé quelques jolies performances. "Quand tu es sélectionneur national, tu dépends beaucoup du travail en club, donc des autres. Quand les gars arrivent en équipe nationale, tu n’as que quatre jours pour travailler la tactique, la philosophie que je défends. Et je ne savais pas ce que les garçons faisaient comme travail physique ou tactique en club."
En club, la donne est différente. "Ici, j’ai un plan que les joueurs doivent suivre au jour le jour, à la semaine, au mois. On prépare l’équipe de A à Z. C’est plus intéressant car il y a plus de responsabilités aussi. Tout est contrôlé ici, que ce soit le physique, la tactique, la technique…"
Et si un jour Bernd Storck devait rallier le club ou le pays de ses rêves ? "Je ne pense pas au futur. Là, je suis à Mouscron et je m’y sens bien", conclut-il avec un petit sourire en coin.
"Je n’imaginais pas cela en Belgique"
Ces derniers mois ont été agités dans le milieu du ballon rond en Belgique. Les affaires se sont multipliées entre les matchs truqués, l’influence des agents et les perquisitions. "Franchement, j’ai été surpris que cela se passe de cette manière en Belgique", souligne l’ancien défenseur du Borussia Dortmund et du Vfl Bochum. "La Belgique est pour moi une grande nation du football. Cela m’a attristé d’apprendre ce qu’il se tramait autour de certaines affaires. Cela n’a rien à faire dans le football. Personnellement, je prends mes distances avec ce type de dossier. Mais je voudrais aussi prévenir : il ne faut pas mettre tout le monde dans le même panier. Il n’y a, selon moi, qu’une minorité de personnes concernées par ces histoires."